Le blason de CHARNY est la combinaison de deux anciens blasons ayant existé dans le passé :
– sur la moitié gauche, le blason des Templiers, propriétaires de la Commanderie de Choisy le Temple : d’argent à la croix alésée de gueules (rouge) – sur la moitié droite le blason de Hue de Charny, dont la famille est une branche cadette de la famille de Juilly (armorial de Wijnberghen en 1267) : de gueules (rouge) à la croix fleurdelisée argent – la gerbe de blé symbolise la ruralité de la commune
(voir en fin de page la notice plus détaillée)
Auteur du Blason :
Jean-Paul DENEF, né en 1940, à BIARRITZ, docteur en médecine en retraite, spécialité dermatologie-vénérologie (faculté de BORDEAUX). Marié, deux enfants, licencié en lettres (histoire), est un spécialiste en héraldique. Il s’intéresse également aux jardins et a écrit en 1992, un livre sur le jardin de MAUPERTHUIS (près de COULOMMIERS) « un parc au siècle des lumières ». Il a aussi rédigé en 1992, la rubrique, sur ce même jardin, dans le catalogue de l’exposition AU TEMPS DES JARDINS, organisée par le département de Seine et Marne, au palais de FONTAINEBLEAU.
Réalisation technique du blason :
Le blason à été infographié (réalisé sur ordinateur) d’après le dessin original de J.P. DENEF, par Pascal et Nancy GUIMARD de CHARNY.
Explications détaillées :
En 2002, le Conseil Municipal de CHARNY a décidé de doter la commune d’un blason, à la place de l’ancien logo. ECU mi parti d’argent à la croix alésée, pattée de gueules et de gueules à la croix fleur de lisée d’argent cantonnée de quatre billettes du même, l’écu posé sur une gerbe de blé d’or. Seules deux billettes sont visibles car l’écu est composé de deux mi-partis, donc seule la moitié de chaque écu est visible ou montrée.
Le premier est aux armes de l’ordre du Temple, le second aux armes de Hue de Charny cadet de la maison de Juilly. La gerbe de blé symbolise la tradition de ruralité de la commune. La combinaison des émaux argent et gueules – blanc et rouge – facilement perçu par le regard, est majoritaire dans l’héraldique naissante aux alentours de 1150 1180, alors que le bleu – azur – pour des raisons politiques et symboliques demeure la couleur du souverain – mais n’oublions pas que l’oriflamme du royaume, dit MONTJOYE, était de toute ancienneté rouge, sans aucune figure ou signe. (1) La croix templière pattée et alésée – n’atteignant pas les bords de l’écu l’extrémité de chaque branche étant légèrement incurvée, trouve très vraisemblablement dans les bannières, pennons et gonfanons (2) – ancêtres de nos modernes drapeaux – une des sources du blason qui va figurer sur le bouclier, pratique de reconnaissance qui « explose » au XIleme siècle, d’abord dans les pays du Nord de la Loire et en Angleterre, où existent de vastes états aux structures politiques et hiérarchiques développées. Les « pauvres chevaliers » du Christ étaient réunis, depuis 1118-1119,en un ordre religieux et militaire, issu des croisades, reconnu en 1128 par la papauté, siégeant à l’emplacement du Temple construit par Salomon à Jérusalem. Sa vocation caritative entraîne un succès considérable, les dons en terre affluent. C’est ainsi que les Templiers apparaissent à Charny, dont ils sont en tout ou partie seigneurs. La commanderie de Choisy le Temple, citée en 1168, mais sans doute fondée auparavant, est créée alors. Le Plessis aux Bois, Saint-Mesmes, la Trace proches sont également en leur possession ainsi que des biens plus éloignés. Un des grands maîtres fut, de 1147 à 1152, Evrard des Barres (3), d’une famille d’origine meldoise, proche du pouvoir royal et sa personnalité ne fut peut-être pas étrangère à la prospérité de l’ordre.
Mais il existait une famille de Charny (4), branche cadette du lignage de Juilly, qui portait des armes identiques mais aux émaux inversés. L’écu de Hue de Charny est présent dans l’armorial dit de Wijnberghen – du nom de l’un de ses possesseurs – actuellement conservé à la Haye – le plus ancien armorial français original connu, composé, pour sa première partie, du rôle d’armes des vassaux
De l’Ile de France, réunis en 1267, pour renouveler leur serment au roi Saint Louis avant son départ pour la VIIIème croisade, à l’apogée de la spiritualité et de l’état médiéval, en ces moments émouvants, où humbles et puissants, partagés entre le rêve et l’espérance, prenaient la marche vers la lointaine Cité du Christ. La croix fleurdelisée peut trouver son origine dans le renfort métallique apporté au bouclier, le plus souvent de bois et de cuir. Son dessein est le gage de l’ancienneté de la lignée qui fit don de tout ou partie de ses biens au Temple. Il faut remarquer que peu de vassaux présents dans le même armorial portent des fleurs de lys, symbole royal – le sire de Nanteuil (le Hauduin) est une exception, dans son cas il ne paraît pas appartenir à un « groupe héraldique » où se retrouvent des familles non parentes par le sang, mais relevant du même lien féodal, phénomène qui démontre l’aspect totémique du blason alors utilisé comme signe de clan.
Si les armes municipales médiévales sont souvent le symbole d’une liberté, parfois difficilement conquise, il n’en est plus heureusement ainsi. Les armes de Charny rassemblent trois récits, deux viennent d’être tissés historiquement et symboliquement. La gerbe de blé, soutenant l’écu, évoque moins l’histoire événementielle que la vocation du terroir, les moissons abondantes – deux moulins sont encore présents à Charny au XVIIème siècle – des vastes plaines du sud du pays de France, conquises sur la forêt originelle, qui ne subsiste plus que sur quelques buttes témoins, les longs siècles de labeurs, le paisible quotidien voué au rythme des saisons sous le grand ciel lumineux de l’Ile de France,, le large horizon de la tradition ouvert sur la modernité. J.P. DENEF.
(1) Une des origines de l’écu royal, d’azur semé de fleurs de lys d’or, se situe dans la couleur et les ornements du manteau du sacre, ceci depuis Clovis et inspiré par l’empire byzantin.
(2) L’étendard de l’ordre appelé BEAUCENS, était d’argent – blanc – au chef de sable – noir – Saint Bernard de Clairvaux était présent lors de la reconnaissance de l’ordre et recommandait aux chevaliers de décorer eux-mêmes leur bouclier. La croix templière peut également avoir été à l’origine un reliquaire hissé lors de combats, en Terre Sainte, comme celle qui figure sur l’écu du royaume franc de Jérusalem et comme la croix dite de Toulouse.
(3) Guillaume Il des Barres, neveu d’Evrard, héros de Bouvines, grand « tournoyeur » – il affronta Richard Coeur de Lion – portait un emblème parlant : une construction faite de barres de tournoi, entourant un « château-échafaud » lui aussi assemblé avec des barres, ensemble démontable où se tenait spectateurs et juge du tournoi.
(4) Les Juilly et Charny appartenaient à la moyenne noblesse et n’avaient pas le droit de bannière. |